jeudi 24 janvier 2013

Huit nouvelles donnes géostratégiques au Moyen-Orient



Quelle que soit la coalition gouvernementale qui émergera des urnes en Israël après le scrutin du 22 janvier, ses leaders devront prendre en compte, pour agir au plan régional avec toute la sagesse requise dans une situation si complexe, ces huit données -complémentaires les unes avec les autres - qui dressent en fait le tableau d’un nouvel environnement global au Moyen-Orient.



1/ En donnant à la Palestine le statut d’« État »,
l’ONU a définitivement enterré le processus d’Oslo

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’on a assisté le 29 novembre dernier au sein du Palais de verre new-yorkais de l’ONU à une scène aussi extraordinaire que fatale : car en accordant à la « Palestine », le statut d’« État observateur » des Nations unies, une écrasante majorité de nations de la planète ont tout simplement annulé et pulvérisé tout le processus initié depuis 1993 par les accords d’Oslo ; lesquels avaient dressé un cadre bilatéral, largement soutenu par toute la communauté internationale, pour parvenir à une résolution du conflit israélo-palestinien par la voie de négociations bilatérales « progressives ».
Pire encore : en agissant ainsi, l’ONU a coupé court à toute discussion ultérieure sérieuse entre Israël et l’AP puisqu’elle a considéré - en invoquant plusieurs résolutions antérieures de son Conseil de Sécurité - que les frontières « naturelles » de cet État de Palestine devront comprendre tous les territoires acquis puis « occupés » par Israël en juin 1967, Jérusalem-Est compris.
À noter aussi que bien qu’ils aient voté contre cette aberrante résolution onusienne, les États-Unis n’ont guère agi pour empêcher son adoption, notamment en tentant de convaincre les nombreux pays européens qui l’ont soutenue des deux mains…

• 2/ La « victoire » de l’Autorité palestinienne
ne lui servira pas à grand-chose, sauf…

Malgré ce « triomphe diplomatique » - qui dans la mentalité arabo-palestinienne aurait fait suite au « triomphe militaire » remporté, à peine quelques jours plus tôt, par le Hamas contre Tsahal lors de l’opération Colonne de Nuée à Gaza, cette décision de l’ONU ne changera pas grand-chose sur le terrain, notamment parce que l’AP et ses dirigeants - considérés à Washington et Bruxelles comme « modérés » par rapport à ceux du Hamas - ne souhaitent pas vraiment créer un État indépendant qui puisse vivre en paix aux côtés d’Israël, comme le définit la fameuse « solution à deux États » préconisée depuis 2005 par les Occidentaux.
Toutefois, la seule chose concrète obtenue par l’AP en ce 29 novembre, c’est un statut juridique minimum qui va lui permettre d’harceler désormais Israël, ses dirigeants politiques et les officiers de son armée dans toute une série de batailles et autres procédures juridiques qu’elle va s’efforcer de présenter devant les cours et tribunaux internationaux, comme ceux de La Haye…

• 3/ La nouvelle approche de la Ligue arabe
« contre l’occupation »
Tirant le constat de sa propre faillite ayant consisté, depuis 1948, à perpétuer et fossiliser le « problème palestinien » afin de s’en servir pour affaiblir et isoler Israël au plan régional et planétaire - au lieu de tenter de le résoudre sur le fond par la conclusion d’une paix juste et durable -, la Ligue arabe vient de procéder à un curieux tournant qui n’augure rien de bon. Evoquant la nécessité d’une « nouvelle approche et de nouvelles méthodes », son président, Nabil Elarabi, vient en effet d’« annoncer la couleur » en critiquant « l’inefficacité patente » des démarches diplomatiques du Quartet (USA, Union européenne, Russie et ONU) déclarant : « Après toutes ces années perdues, notre objectif central doit être de mettre fin concrètement à l’occupation israélienne, et non pas de s’efforcer de signer des accords temporaires ne concernant que des ‘cercles fermés’ et qui, faisant gagner un temps précieux à Israël, lui permettent en fait de développer ses implantations ! ».
On est donc en droit de se demander, dans le contexte de l’immense onde si déstabilisante de choc qui soulève depuis deux ans les pays arabes de la région, ce que peut bien signifier « mettre fin concrètement à l’occupation israélienne » ?!

• 4/ Vers une plus grande aggravation de l’instabilité régionale
Même si l’on écarte - non sans une grosse dose d’optimisme ! - l’hypothèse assez noire voulant que ce sera bientôt le tour à la Jordanie et à sa fragile monarchie hachémite de se retrouver « en un rien de temps » totalement déstabilisée par le lent et patient travail de sape mené depuis des années par les Frères musulmans et les réseaux d’Al Qaïda à l’est du Jourdain, deux énormes pôles d’instabilité vont, à n’en pas douter, continuer de miner la situation politique et sécuritaire de tout le Moyen-Orient :
1- La guerre civile syrienne, où l’armée de mercenaires professionnels (alaouites, chiites et autres) qui constitue la Garde prétorienne du régime agonisant de Bachar Assad, dispose encore d’assez d’armes en tous genres et de moyens de terreur de masse pour perpétuer ce sanglant conflit jusqu’à un éventuel dénouement tragique… Ce qui constitue en soi une menace régionale globale suspendue, telle une « Epée de Damoclès », sur tous les pays voisins ;
2- La persistance des velléités d’hégémonie régionales de l’Iran, qui, justement contrées par les progrès de l’opposition armée sunnite en Syrie et la fin probable du régime Assad, sont déjà en train de se recentrer en un vaste processus de déstabilisation des pays du Golfe persique, à commencer par le Bahreïn (où la majorité de la population est chiite), le Yémen (à forte minorité chiite), puis le Qatar, et enfin le poumon énergétique et idéologique de « l’empire sunnite » qu’est toujours l’Arabie Saoudite. Avec les conséquences tous azimuts que cette stratégie va générer, surtout si l’Iran devient une puissance nucléaire.

• 5/ L’élargissement du conflit entre sunnites et chiites
met fin à un mythe bien ancré…


La radicalisation à grand échelle du vieux conflit entre sunnites et chiites qui dure depuis des siècles dans tout le Moyen-Orient - sans parler de l’épineuse « question kurde » aux confins de la Turquie, de la Syrie, de l’Irak et de l’Iran, ni des Coptes en Égypte et ailleurs, ni des nombreux autres conflits agitant la scène régionale - montre bien combien est sans fondement la thèse centrale du leadership palestinien, reprise en chœur par la Ligue arabe pour nuire à l’État hébreu, selon laquelle ce serait le conflit israélo-palestinien qui génèrerait l’instabilité de toute cette région. Ce que font encore semblant de croire les puissances occidentales ainsi que tous leurs médias pratiquant sans cesse l’« Israël bashing » - pour de sombres raisons qui leur sont propres…

• 6/ Le mirage du « link » entre le nucléaire iranien
et le dossier palestinien s’est évaporé


Alors qu’il fut brandi en forme de « prétexte » dès janvier 2009 par Washington (puis par Bruxelles) dans le sillage de l’installation de la 1e administration Obama à la Maison Blanche, l’autre mirage qui s’est évaporé ces deux dernières années, c’est ce link implicite que les Occidentaux ont voulu faire entre la résolution - très impérieuse à leurs yeux - du conflit israélo-palestinien et une issue à trouver dans le dossier du nucléaire iranien en avançant sur les tapis rouges de toutes les chancelleries face aux diplomates et responsables politiques israéliens la fausse équation suivante : « Aidez-nous à nous montrer plus actifs contre le nucléaire iranien en facilitant, par de ‘bons gestes’ de votre part, l’accès à une solution au problème palestinien ! ».
Or deux épines en forme d’évidences ont totalement dégonflé la grosse baudruche de ce link impensable : le fait qu’après les fortes pressions exercées par Obama au début de son 1er mandat, le gouvernement Nétanyaou ait accepté - fait sans précédent en Israël ! - de geler pendant dix mois les constructions juives en Judée-Samarie n’a pas du tout poussé l’AP à revenir à la table des négociations ; et le fait encore plus persistant voulant que de son côté, l’Iran qui n’a que faire du « dialogue critique » engagé avec lui par les puissances du G5 + 1 autour de son programme nucléaire, se sert en fait de ces pourparlers lancinants et vides de tout sens pour gagner un temps précieux et préparer de facto ses premières bombes atomiques !

• 7/ L’urgence impérieuse d’agir contre la bombe des mollahs !
Il ressort de tous les points précédents qu’il est plus urgent et indispensable que jamais de stopper, dès maintenant, la folle course des mollahs iraniens au moyen de sanctions bien plus dures et surtout de la menace effective d’une intervention militaire élargie contre leurs infrastructures : non seulement parce rien d’autre ne les fera décrocher de leur « rêve atomique », qui constitue l’épine dorsale des ambitions hégémoniques régionales du régime islamiste intégriste installé à Téhéran ; mais parce que si on les laisse faire et qu’on finit - comme certaines voix le prêchent à Washington même - par accepter de « vivre avec un Iran nucléaire », comment imaginer ce que deviendra la dangereuse instabilité de cette région, déjà si tumultueuse, le jour où des groupes terroristes placés sous l’influence directe de Téhéran comme le Hezbollah (au nord d’Israël) et le Hamas (au sud) seront placés sous le nouveau parapluie nucléaire de l’Iran… ?

• 8/ Avec le 2e mandat d’Obama, de nouveaux gros nuages dans les relations Washington-Jérusalem…
Contrairement à ce qu’ont prétendu certains experts des Affaires américaines - sans doute trop optimistes - en novembre dernier, au moment de la réélection d’Obama pour un 2e mandat de président, en disant que même s’il n’a maintenant « plus rien à perdre » au plan politique, il ne se « vengerait » pas contre Nétanyaou, il s’avère en fait que l’hôte de la Maison Blanche, désormais reconduit pour quatre nouvelles années dans ses fonctions, risque de bel et bien mener la vie dure à Israël : pas seulement parce qu’il voudra obliger Jérusalem à faire encore des « gestes » (à savoir de nouvelles concessions unilatérales) en pensant ainsi faire sortir le processus diplomatique de son impasse actuelle ; ce que laissent présager les dernières « fuites » du journaliste Jeffrey Goldberg relatant les remarques d’Obama en personne sur le fait que Nétanyaou mènerait « une politique provocatrice et isolationniste qui ne préserve pas les intérêts bien compris d’Israël (…) et qui s’avère incapable d’aller vers un compromis avec les Palestiniens »…
Mais aussi et surtout parce qu’il y a de fortes chances que le président et son nouveau secrétaire à la Défense, Chuck Hagel, aient déjà décidé que, dans le contexte international à la fois dépressif et explosif d’aujourd’hui, la voie diplomatique du « containment » était tout à fait suffisante contre le nucléaire iranien, en lieu et place d’une quelconque intervention militaire…

Source Hamodia