dimanche 27 avril 2014

Opinion : le double jeu d'Israël face au Hamas


Il était difficile de ne pas percevoir le soulagement des dirigeants de droite suite à l’accord signé mercredi entre le Fatah et le Hamas à Gaza en vue de la formation d’un gouvernement d’union nationale. Si le “pouf” du secrétaire d’Etat John Kerry, lors de son allocution inoubliable devant le Sénat, accusait Israël d’être le principal responsable de l’échec des négociations, les Etats-Unis ont également condamné la réconciliation palestinienne. Finalement, le gouvernement de Netanyahou n’est plus le responsable de l’échec des pourparlers...



Il suffisait de voir Benyamin Netanyahou expliquer au jeune ministre autrichien des Affaires étrangères que le président Abbas devait choisir entre la paix et le Hamas, pour comprendre la joie immense au cabinet du Premier ministre israélien.
Un autre gouvernement en Israël aurait compris qu’il s’agit là d’une opportunité à examiner avec sérieux et attention. La signature d’un accord final avec les Palestiniens est impossible tant que les Palestiniens sont divisés, et tant que le gouvernement du Hamas refuse d’écouter l’OLP en Cisjordanie.
Mahmoud Abbas ne peut pas s’engager, même après la signature d’un accord, à ce que les dirigeants de la bande de Gaza cessent leurs tirs de roquettes et de missiles sur Israël. Par conséquent, c’est la raison pour laquelle tout accord avec Abbas ne s’appliquerait qu’à la Cisjordanie.
Un autre gouvernement israélien aurait salué la tentative d’unification, à consition qu’elle ne se fasse pas au détriment d’Israël.
Le Hamas n’a visiblement pas l’intention d’annoncer publiquement qu’il reconnait les accords d’Oslo et l’Etat d’Israël et qu’il renonce au terrorisme. Si cela se produisait, ses leaders auraient sans hésitation été salués.
Le processus en cours peut conduire à la formation d’un gouvernement d’union dirigé par Abbas (ou un autre dirigeant non-affilié au Hamas) avec la participation de ministres techniciens.
Si ce genre d’experts se joignent réellement au gouvernement, même s’ils sont recommandés par différents groupes non impliqués dans des activités de terrorisme ou violentes, et si ce nouveau gouvernement respecte les accords passés et soutient la paix avec Israël en écartant le terrorisme, il sera juste d’engager avec lui des négociations et de l’encourager à coopérer avec Israël dans de nombreux domaines.
Un autre gouvernement israélien aurait compris que le Hamas se trouve dans une situation particulièrement difficile et qu’il est par conséquent enclin à accepter davantage de concessions fondamentales, directement ou indirectement, pour assurer la pérennité de son pouvoir dans la bande de Gaza et son avenir dans la réalité palestinienne.
Exactement comme l’OLP avait été prête à s’engager dans les pourparlers d’Oslo après avoir été affaiblie par son soutien à Saddam Hussein pendant la première Guerre du Golfe. Lle Hamas a également démontré qu’il pouvait faire preuve de maîtrise de soi et d’une certaine capacité à empêcher la violence d’autres mouvements dans la bande de Gaza.
Israël, qui n’avait pas d’autre choix, a déjà négocié plusieurs fois avec le Hamas et avait trouvé un partenaire pour des accords ponctuels (la libération de Gilad Shalit ou encore le cessez-le-feu qui a mis fin à l’Opération “Pilier de défense”) que le Hamas a respectés . Il pourrait être aussi un partenaire dans le cadre de processus plus spectaculaires, même s’il est plus simple d’agir derrière le dos d’Abbas.
Je ne suggère pas d’ “embrasser” le Hamas. D’une part parce que le Hamas n’est pas intéressé à nous “embrasser”, et aussi parce qu’il n’a pas encore prouvé qu’il est passé de la phase du soutien à la violence à celle du soutien au dialogue.
Cependant, je ne conseille évidemment pas non plus d’arrêter de négocier avec Abbas sous prétexte qu’il tente de faire émerger un front palestinien unifié.
Les pourparlers doivent se poursuivre avec l’OLP qui est notre partenaire pour la paix. Si une coopération se met en place entre le Fatah et le Hamas et qu’elle donne naissance à un gouvernement d’union nationale accepté par les deux organisations, et si ce gouvernement se base sur des principes acceptables par nous, je ne recommande pas de le boycotter simplement parce qu’il est soutenu par le Hamas.
Nous devrions garder à l’esprit – tout en considérant les différences existantes – qu’il y a au sein du gouvernement israélien des ministres formellement opposés à des traités internationaux qu’Israël a signés, des ministres qui rejettent la création d’un Etat palestinien et appellent à l’annexion des Territoires (ou une partie d’entre eux tout au moins)et pourtant cela n’est pas la ligne directrice du gouvernement.
Il y a beaucoup d’hypocrisie dans cette diplomatie selon laquelle la position du gouvernement palestinien ne suffit pas et que s’il est soutenu par quelqu’un qui n’est pas tenu par les accords d’Oslo parce qu’il ne les a pas reconnus, alors nous le boycotterons.
Le Dr. Yossi Beilin est le président de Beilink Consulting Business. Il a été trois fois ministre. Il fut député de la Knesset pour les partis Avoda et Meretz. Il a été l'un des pionniers des accords d'Oslo, de l'Initiative de Genève et de Birthright (Taglit).

Source I24News